Couvrir une guerre à 10 000 km de chez soi : entre vérité et impuissance

Un journaliste de guerre portant un gilet pare-balles avec l’inscription « PRESS », tenant un appareil photo dans un lieu en ruines.

Chaque journaliste en son for intérieur espère un jour pouvoir dépasser son impuissance et jouer un rôle sur un terrain. Un rôle qui sort suffisamment de l’ordinaire pour que l’on s’en souvienne à jamais. Une petite anecdote qui fera parler de ce héros de journaliste. Cette anecdote qui alimentera les conversations des cercles. Un rêve parfois confronté à la violence du terrain, comme en témoigne l’expérience de Jacques Cardoze !

La traque de Saddam Hussein : entre espoirs et désillusions

Lors de la guerre en Irak, des journalistes de tout médias espéraient pouvoir retrouver Saddam Hussein ! Le dictateur a su se dissimuler dans le pays grâce à un réseau de connaissances et à un noyau de fidèles persuadé qu’il reviendrait un jour au pouvoir. L’espoir a longtemps perduré. Car le jour de la chute du régime irakien en mars 2003, la plupart des dignitaires avaient subitement disparu. Ils étaient comme évaporés dans la nature… Et il s’en est suivi une longue traque qui n’a pris fin que quelques mois plus tard.

Et encore, grâce à un renseignement de terrain. Un espion local qui a su que Saddam Hussein se terrait dans un trou. Il ne restait plus qu’à une unité spéciale de l’armée américaine d’intervenir discrètement. Chacun se souvient alors de l’image de ce Saddam barbu, les cheveux en bataille, hirsute, au regard dur faisant face à la caméra. N’empêche que le dictateur avait échappé à la vigilance de l’armée américaine pendant plusieurs mois. Et donc à celle des journalistes qui auraient bien voulu eux aussi réussir le coup du siècle ! Un mythe tenace pour tous les journalistes qui le soir se retrouvaient dans le lobby de l’hôtel Palestine. Tous espéraient être l’auteur « du fameux gros coup ».

C’est le fameux mythe du « tintin reporter » !

Le tintin reporter ne se contente pas de rester le témoin passif d’évènements. Il agit. Il devient le héros d’un évènement et casse ainsi la routine de l’information et d’un storytelling déjà connu. C’est là sans doute l’une des plus grandes frustrations du journaliste. Impossible pour lui de sortir de son rôle. Sous peine de se retrouver en contradiction avec ses valeurs et les principes des chartes de la profession. On se souvient de ces artistes qui voulant agir contre la famine en Afrique dans les années 80 et qui n’hésitaient pas à revenir avec quelques-uns de ces enfants pour « les sauver » des pays pauvres en les ramenant chez eux aux USA.

C’est un peu la même chose pour certains confrères qui rêvent eux aussi de devenir l’acteur d’une action positive. Par exemple « retrouver » un enfant avant des secouristes lors d’un tremblement de terre et être en situation soi-même d’appeler les secours. C’est le summum, car c’est ce qui fera bien sûr le thème du reportage. On pourra raconter avec un air faussement modeste comment on a réussi à sauver un enfant. Autre fait de gloire : Être le premier sur le site d’une catastrophe et se retrouver ainsi en possession d’éléments exclusifs avant même le passage des sauveteurs. Ou encore tomber nez à nez avec les témoins exclusifs d’une scène de catastrophe.

Où se situe la limite pour le journaliste ?

Censé ne jamais intervenir et rester témoin, il est en réalité très attiré par la possibilité de récupérer des éléments exclusifs. Parfois à ses risques et périls. Jacques Cardoze, alors envoyé spécial au Liban en 2006, se souvient d’avoir été dépêché sur les lieux d’un bombardement. Celui-ci avait occasionné la mort de six enfants dans un petit village du sud du pays. Reporter pour France Télévision, Cardoze est le premier sur les lieux. Mais avant même d’atteindre le cœur du village, un chef de bande stoppe net l’équipe de France Télévision et braque Jacques Cardoze pistolet sur la tempe. L’équipe est contrainte d’opérer un demi-tour et même d’effacer les premières images filmées et présentes dans la caméra.

Entre vérité et impuissance ?

Impossible dans ce cas précis de raconter ce qui s’était passé pour ces enfants. Impuissance encore. Les journalistes doivent apprendre à vivre avec

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