Alain Ruffion (médiateur) a devant lui un couple séparé depuis six ans. Le divorce n’a pas été prononcé mais la garde des enfants se passe bien. Ce couple, qui maintenant a choisi de divorcer officiellement, fait appel à un médiateur car il ressent le besoin ” d’une tierce personne qui puisse aider à partager les biens, répartir la charge du budget accordé aux enfants…” .
Tous deux feront part, en fait, de bon nombre de leurs préoccupations. ” Et si je tombe au chômage, que vais-je faire pour payer les charges de la maison ? “, s’interroge le mari.
” Nous sommes très à l’écoute de nos interlocuteurs, précise Alain Ruffion, et surtout nous ne les jugeons pas de haut. Nous faisons un bout de chemin avec eux pour qu’ils trouvent une solution ou qu’ils analysent plus clairement leur situation. Nous tenons surtout à leur laisser la propriété et la responsabilité de leur décision “.
Les médiateurs familiaux n’arrivent pas toujours à de tels dénouements et rencontrent d’autres situations plus épineuses. Et Alain Ruffion sait de quoi il parle puisqu’un entretien entre une mère et sa fille de 17 ans a mal tourné. A tel point ” qu’il y avait tant d’agressivité, la mère cherchant à détruire la fille, que nous avons dû arrêter l’entrevue. En fait, ajoutera-t-il, nous ne disons pas assez que notre travail c’est aussi de séparer et non de rapprocher à tout prix. Lorsque des personnes sont prises dans des tensions destructrices et interminables, nous les invitons à prendre du recul par rapport à cette situation. Des couples peuvent ainsi décider de se séparer “.
Le médiateur n’est donc pas un réconciliateur ni un juge, ni un arbitre. Ce qui demande un travail sur soi important pour ” ne pas projeter nos propres difficultés familiales en pleine médiation… expérience précédente nous a montré que nous prenions parti pour la fille de 17 ans “, ce qui peut enlever toute crédibilité du médiateur face à la mère pour la suite des évènements.
C’est pourquoi de nombreux professionnels s’accordent sur la nécessité d’une formation conséquente.
L’Institut de Formation à la Médiation précise que ” sans être un expert, le médiateur familial doit posséder des connaissances en psychologie, en droit et en économie. 11 doit également connaître les valeurs véhiculées par sa propre culture et avoir conscience de la pluralité tant des valeurs culturelles que des anodes de fonctionnement des familles “.
A ce sujet, nous mentionnons une expérience, “Temps de parole”, menée à la Maison de la Médiation à Paris.
Les participants, d’horizons divers, parlent de leurs situations familiales, échangent des informations, parfois débloquent des situations, et en tout cas sortent de leur isolement.
Ce qui fera dire à l’un des organisateurs qu’ici, les gens apprennent à s’écouter, vont leurs chemins, sans que personne ne leur dise ce qu’il faut faire…”.