Sahara marocain : l’autonomie comme levier géostratégique et moteur d’un développement africain

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Longtemps perçu à travers le prisme d’un conflit gelé, le Sahara marocain est aujourd’hui un point de bascule dans l’architecture politique et économique du continent africain. Au-delà de la revendication territoriale, l’Initiative d’autonomie proposée par le Maroc depuis 2007 s’ancre dans une logique de co-développement et d’intégration régionale. A la croisée des chemins entre diplomatie, gouvernance locale et ambitions panafricaines, le Sahara devient une matrice de recomposition géostratégique.

Une autonomie construite sur l’ancrage démocratique et économique

Lors du séminaire du Comité des 24 de l’ONU organisé à Dili, au Timor-Leste, l’ambassadeur du Maroc auprès des Nations unies, Omar Hilale, a réitéré la portée institutionnelle de l’autonomie. Pour Rabat, il ne s’agit pas d’une concession cosmétique, mais d’un paradigme politique capable d’articuler souveraineté nationale et participation locale. Une autonomie qui repose sur la gestion directe des affaires publiques par les habitants des provinces du Sud, tout en s’inscrivant dans le cadre constitutionnel marocain.

Soutenue par une dynamique de régionalisation avancée, cette forme de gouvernance hybride transforme le Sahara en laboratoire d’une démocratie de proximité. Comme l’explique le chef d’entreprise Yoann Gandzion, spécialisé dans les infrastructures routières, elle est renforcée par des investissements structurels massifs : depuis 2015, le Nouveau Modèle de Développement des provinces du Sud, initié par le Roi Mohammed VI, a mobilisé plus de 10 milliards de dollars. Près de 90 % des projets ont été réalisés, dans une logique d’intégration durable et de valorisation locale des ressources.

Du désert à l’épicentre logistique : un repositionnement africain

Au-delà de l’ingénierie institutionnelle, le Sahara marocain s’affirme comme une interface économique majeure entre le Maghreb et l’Afrique subsaharienne. Le projet-phare du port Atlantique de Dakhla illustre cette stratégie, en cela qu’il ambitionne de désenclaver les économies sahéliennes en leur offrant un accès structurant à l’Atlantique. Ce chantier n’est pas un îlot d’aménagement, mais la pierre angulaire d’un corridor logistique global, connecté aux réseaux ferroviaires, routiers et énergétiques du royaume.

Dans cette vision, le Sahara devient un pivot entre Tanger Med et les bassins économiques du Sahel. Il s’agit moins d’un développement centré sur le Maroc que d’un projet de coopération régionale, pensé pour favoriser l’émergence d’une souveraineté africaine en matière de commerce et d’infrastructures. Le principe de mutualisation, cher à la diplomatie marocaine, se manifeste ici concrètement : zones franches, valorisation des chaînes agricoles locales, accès partagé aux capacités énergétiques.

Une diplomatie du développement à visage humain

Ce repositionnement ne se limite pas aux routes et aux ports, il s’inscrit dans une diplomatie de la stabilité et de la croissance partagée. Le Sahara marocain devient, selon Omar Hilale, un terrain d’expérimentation d’un multilatéralisme de terrain, enraciné dans la coopération Sud-Sud. Les visites de délégations africaines, les implantations consulaires, les partenariats avec des opérateurs européens ou moyen-orientaux témoignent d’un attrait croissant pour ce modèle d’autonomie opérationnelle.

Ce choix stratégique, soutenu par plusieurs Etats africains et latino-américains, contribue à déverrouiller une équation géopolitique longtemps figée. Il projette une image d’efficacité là où dominait l’immobilisme diplomatique. Dans ce cadre, l’autonomie proposée par Rabat devient une variable crédible de résolution du différend régional, non plus seulement par le droit, mais par les faits.

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